La longue histoire géologique de la Normandie explique la diversité et la richesse des roches, des fossiles, des ressources minérales exploitées, des sols et finalement des paysages de cette région.
Dans la connaissance de la stratigraphie du Bassin anglo-parisien, l’étude des carrières et des falaises littorales du Calvados a joué un rôle très important. En raison du faible plongement des terrains jurassiques vers le centre du Bassin parisien, la presque totalité de la série jurassique affleure soit dans des carrières soit sur la côte. Le découpage stratigraphique des terrains jurassiques normands a d'abord bénéficié des travaux et subdivisions lithostratigraphiques introduites par G. de Gerville (1814, 1817), M. Hérault (1832) et A. de Caumont (1828), elles-mêmes fruits d'une discussion avec les stratigraphes anglais contemporains (de la Bêche, Buckland…) qui ont visité les principaux affleurements et carrières de la Normandie. Plus tard, A. d'Orbigny (1849) a choisi bon nombre des localités de référence pour ses étages jurassiques sur la côte normande, d'abord parce qu'il avait lui-même étudié ces coupes fossilifères avec les géologues normands de l'époque, mais aussi parce qu'il disposait dès cette époque d'un pré-découpage des séries normandes établi par les géologues locaux ou anglais, avec les collections paléontologiques s'y rapportant.
Mais l'essor de la stratigraphie régionale est à mettre à l'actif d'une dynastie de géologues débutant avec J.-A. Eudes-Deslongchamps (1838a et b), zoologiste et paléontologiste célèbre pour sa découverte d'un crocodile marin fossile dans le Calcaire de Caen (Teleosaurus cadomensis). Puis, son fils Eugène, élève d'Hébert, s'intéresse tout à la fois à la paléontologie et à la stratigraphie du Jurassique. Enfin, le gendre de ce dernier, A. Bigot (1892 à 1940), poursuivra l'œuvre entreprise. Il est l'infatigable géologue de terrain de la Normandie, du socle et de sa couverture. Tout en participant au lever de plus de 15 cartes géologiques à 1/80.000 en 50 ans, ses notes et ouvrages demeurent encore aujourd'hui une source inépuisable de renseignements précis.
Après la destruction des collections universitaires sous les bombardements alliés, c'est sous l'impulsion de L. Dangeard, successeur d'A. Bigot dans la chaire de géologie, que la géologie régionale normande s'oriente vers une comparaison avec les phénomènes de sédimentation actuelle (Dangeard, 1930 à 1951). L'accent est mis sur les reconstitutions paléogéographiques, les transits sédimentaires et fauniques. La révision contemporaine du Jurassique normand est l'œuvre de M. Rioult. À la minutie des descriptions lithologiques et fauniques pour les affleurements liasiques publiées dans sa première thèse (1968a), fait place dans une seconde thèse (1968b) une synthèse paléogéographique de tout le Jurassique, discutant les interactions entre sédimentation, faune et tectonique. La période 70-80 sera aussi le redémarrage des synthèses paléogéographiques du Jurassique normand, représentant la somme des informations litho- et biostratigraphiques amassées dans les collections et les revues. C'est sous son impulsion que les terrains bathoniens (Fily, 1974, 1975a et b, 1978, 1980, 1989a) et callovo-oxfordiens (Dugué, 1989a, 1990, 1991, 1995) seront revisités.
Carte des sites de l'inventaire du patrimoine géologique de Basse-Normandie.